" La lacération représente pour moi ce geste primaire, c'est une guérilla des images et des signes. D'un geste rageur, le passant anonyme détourne le message et ouvre un nouvel espace de liberté. Pour moi, les affiches lacérées rapprochaient l'art de la vie et annonçaient la fin de la peinture de transposition. "
Peintre et plasticien français, membre fondateur des Nouveaux Réalistes, Jacques Villegle est considéré comme le chef de file des affichistes. En citant ces lignes de Baudelaire dans Urbi et Orbi, un livre qui retrace et théorise son parcours, Jacques Villeglé tend à donner à l’artiste le statut de regardeur des images du monde, qu’il s’approprie et métamorphose à sa manière. Jacques Villegle est un flâneur, qui au fil même de ses promenades dans les rue de la ville, prélève sur les panneaux publics les restes d'affiches déchirées qui l'intéressent d'un point de vue esthétique. Sa démarche n'est pas de rajouter une composition ou de la couleur à l'affiche marouflée, mais de découvrir dans la superposition des épaisseurs de papier lacérés, la beauté d'une forme, d'une couleur, d'une épaisseur de déchirures, celle d'une tache faite par une main anonyme, d'un graffiti, d'une écriture parfois, pour laisser apparaître l'aspect sauvage et spontané en soi de la vie civilisée et urbaine, riche dans sa sauvagerie, de figures de beautés vierges et uniques.